Il était une fois...la numération. Partie V : la numération romaine

Publié par Jacques Bourgois, le 5 mai 2022   8.6k

Les Romains ont inventé la ‘calculatrice de poche’, mais quelle était leur numération dont il nous reste encore quelques vestiges ?

Le principal héritage que nous devons à la Rome antique est la langue latine qui a évolué par la suite vers les langues romanes comme le français, l’italien, l’espagnol, le portugais.

Les romains ont également :

  • inventé la science juridique et la diplomatie, les premiers ‘droits’ des femmes, l’art de la guerre,
  • développé l’art des jardins, l’architecture et l’urbanisme (héritage grec),
  • repris chez les grecs le meilleur : éducation, philosophie, sciences, art (peinture, sculpture, architecture), médecine

sciences que nous utilisons ou étudions encore de nos jours.

Cette cinquième partie de la série traite de la numération romaine dont nous gardons la trace dans de nombreuses expressions : XXIème siècle, les années du calendrier républicain (15 vendémiaire an II), le numéro d’ordre d’un régime politique (la Vème République), Louis XIV, le XV de France, numéro des actes de théâtre, cadran des horloges, tome des ouvrages importants … Cette numération fut la nôtre jusqu’au Moyen-Age.

La numération romaine est un système additif et relativement récente puisqu’elle date du 1er siècle av.J.C. Les nombres sont représentés à l’aide de symboles combinés entre eux : I, V, X, L, C, D et M qui représentent les valeurs 1, 5, 10, 50, 100, 500 et 1000.

Les chiffres romains ne sont pas des lettres mais des symboles dérivant de la numération étrusque datant de 500 av.J.C. :

Les nombres selon la numération romaine :

  • Ecriture de gauche à droite
  • Valeurs groupées par ordre décroissant
  • Un même symbole ne peut être employé plus de 3 fois de suite (sauf M qui peut être écrit 4 fois)
  • Tout symbole qui suit un symbole de valeur supérieur s’ajoute à ce dernier : 6 s’écrit VI
  • Tout symbole qui précède un symbole de rang supérieur se retranche de ce dernier : 4 s’écrit IV, 40 s’écrit XL

Mais plusieurs graphies ont existé :

  • IIII plutôt que IV (il est possible de retrouver cette graphie sur d’anciennes horloges)
  • VIIII plutôt que IX sur d’anciennes monnaies romaines

Les nombres romains :

Exemple :

MMMDCCCLXXVIII = 1000+1000+1000+500+100+100+100+50+10+10+5+1+1+1 = 3 878

Avec un tel système additif à 7 symboles, le plus grand nombre pouvant être écrit est : MMMMCMXCIX = 4999

Cela est simple jusqu’à 4999, et après cette valeur ? des symboles supplémentaires ont été ajoutés vers l’an 200 sous le règne d’Hadrien :

  • Une barre horizontale appelée vinculum indique un facteur multiplicatif par 1000 :

Il peut également y avoir 2 barres horizontales au-dessus d’un nombre, ce qui signifie une multiplication par 1000x1000 = 1 000 000

  • Deux traits verticaux à gauche et à droite d’un nombre indiquent un facteur multiplicatif par 100. Exemple : |V| = 500
  • Cette dernière notation peut être jointe à la première. Exemple :

Exemple : le recensement des citoyens romains sous l’empereur Tibère est le suivant d’après un document retrouvé dans les ruines d’Ostie :

La petite histoire :

Notation des fractions

Les Romains utilisaient un système duodécimal (base 12) pour noter les fractions, car 12 se divise facilement par 2, 3, 4, 6 et 12. Les fractions sont représentées par des points et la lettre S (semis signifiant moitié). Ceci est utilisé notamment pour la valeur des monnaies dont la valeur unitaire était l’as.

1 triens romain :

Il existait également les fractions unitaires :

L’apprentissage du calcul par les enfants n’était pas chose aisé comme l’a écrit Horace dans l’’Art Poétique’ en l’an 325 : « Voyons, fils d’Albinus, de 5 onces j’en retranche 1, combien en reste-t-il ? Tu hésites. 1/3 d’as. A 5 onces, j’ajoute 1 once, quel est le résultat ? 1/2 as ».

Opérations mathématiques

Les Romains n’ont que peu contribué au développement des mathématiques et des sciences en général. Cependant, ils étaient de grands architectes et avaient besoin de compter mais la numération romaine ne pouvait être utilisée pour les calculs : comment faisaient-ils ?

Ils ont repris l’usage des abaques égyptiens (voir partie III de ce dossier) ou grecs (voir partie IV de ce dossier) en les modifiant par ajout d’une ligne supplémentaire.

Détail d’un bas-relief de sarcophage représentant des personnages assis devant une ‘table à compter' :

L’abaque romain est une table comportant des colonnes représentant une puissance de dix dans l’ordre décroissant de gauche à droite. La ligne supérieure correspond à 5 unités de la colonne correspondante.

Ci-dessous est représenté le nombre 794675.

Addition :

Pour les additions, pas de problème particulier il suffit après avoir placer les jetons du premier nombre sur l’abaque d’y ajouter les jetons du second nombre puis de lire le résultat.

Soustraction :

Même principe, on enlève les jetons du nombre à soustraire et on lit le résultat.

Multiplication :

Les choses se compliquent car les Romains ne savaient que multiplier ou diviser mentalement par 2 ou par 10. Pour effectuer une multiplication, ils utilisaient deux méthodes :

  • Pratique des additions successives : 15*5. Ils faisaient 5 fois la somme de 15. Pour les grands multiplicateurs, cela devait être fastidieux !
  • Pratique de la duplication : 55*12. Comme ils savaient multiplier par deux, ils notaient le double de 55, puis le double de 110, puis le double de 220, etc …
  • Usage de la multiplication par 10 : 55*12. Ils multipliaient dans un premier temps 55 par 10, puis ajouter deux fois 55 pour obtenir le résultat.

Division :

Il n’existe pas d’écrit pour expliquer comment les Romains faisaient une division.

Les calculettes romaines :

Les tables à compter étant encombrantes, des ‘calculatrices’ de poche étaient également utilisées : planchette enduite d’une couche de cire où l’on gravait les chiffres (I à IX) dans les colonnes correspondantes à l’aide d’un stylet.

ici : 32680

Il existait également d'autres sortes de bouliers de poche, en métal ou en ivoire, ils comportaient plusieurs rainures divisées chacune en deux parties, dans lesquelles coulissaient des petites perles (la petite colonne de droite servait à utiliser les nombres fractionnaires). Ci dessous la photo d'un boulier romain (Musée archéologique d'Aoste-Italie).

Les Romains ne possédaient pas l’écriture des nombres sous forme décimale avec une numération de position, mais l’utilisation de leur abaque montre qu’ils en connaissaient le principe.

Remerciements : L'auteur remercie Aourell LANFREY (médiatrice scientifique, La Rotonde, Ecole des Mines de Saint-Etienne) de sa participation à l'élaboration de cet article. 

numeration romaine (free.fr)

les chiffres romains - numération (free.fr)

numeration-romaine - mathaulogis (wifeo.com)

Les chiffres romains de 1 à 5 millions - EspaceFrancais.com

HISTOIRE DE LA NUMERATION : Maths-rometus, Numération, Babylone, Egypte, Chine, Grèce, Mayas, Romains, Mathématiques, Maths, Math, Jean-Luc Romet

Microsoft Word - PESUhistoirev2 (educmat.fr)

Numération romaine — Wikipédia (wikipedia.org)